Le port du voile par une avocate en exercice est un sujet qui suscite des débats en France. Entre la nécessité de respecter la laïcité et les principes fondamentaux de la profession, la question a été tranchée par plusieurs décisions judiciaires.
Le Conseil national des barreaux (CNB) et le Conseil d’État ont validé une interdiction stricte du port de tout signe distinctif, y compris religieux, avec la robe d’avocat. Cet article fait le point sur la réglementation en vigueur et ses implications pour les avocates de confession musulmane.
Le cadre juridique : peut-on interdire le port du voile aux avocates ?
Les règles professionnelles des avocats
La profession d’avocat est soumise à des obligations précises en matière de neutralité. Selon l’article 3 de la loi du 31 décembre 1971, les avocats doivent porter un costume professionnel unique : la robe noire. En 2023, le Conseil national des barreaux (CNB) a ajouté une précision majeure à cette règle (décision du 7 septembre 2023 portant modification du règlement intérieur national de la profession d’avocat) :
« L’avocat ne porte aucun signe distinctif avec sa robe ».
Cette disposition signifie que toute avocate souhaitant plaider ne peut porter de signe religieux visible, y compris le voile islamique.
Les décisions de justice sur l’interdiction du voile
- La Cour de cassation (arrêt du 2 mars 2022) a jugé que le port de signes distinctifs de convictions religieuses, philosophiques, communautaires ou politiques était incompatible avec l’indépendance de la profession d’avocat.
- Le Conseil d’État (décision du 3 mars 2025) a rejeté le recours du Syndicat des avocats de France (SAF) qui contestait l’interdiction du CNB, confirmant ainsi sa légalité.
Pourquoi cette interdiction ? Neutralité et indépendance de l’avocat
L’indépendance de l’avocat face aux justiciables
L’indépendance est une valeur fondamentale de la profession d’avocat. Un avocat ne doit afficher aucun signe laissant transparaître ses convictions personnelles, qu’elles soient politiques, philosophiques ou religieuses.
L’égalité des justiciables devant la justice
L’uniformité du costume d’audience vise également à garantir un procès équitable pour tous. L’apparence des avocats ne doit en aucun cas influencer la perception du public ou du tribunal.
« Un costume uniforme contribue à assurer l’égalité des avocats et, à travers celle-ci, l’égalité des justiciables, élément constitutif du droit à un procès équitable ».
Les limites de l’interdiction : où peut-on porter le voile en tant qu’avocate ?
Hors des tribunaux : liberté vestimentaire préservée
L’interdiction du port du voile s’applique uniquement lors des audiences judiciaires. Une avocate peut librement porter le voile dans l’exercice de son activité en cabinet, lors de consultations juridiques ou dans toute autre situation où la robe d’avocat n’est pas requise.
Manifestations et grèves
Lorsque les avocats participent à des manifestations ou des mouvements de grève, le CNB ne leur impose aucune restriction sur le port de signes distinctifs avec la robe.